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Impression 3D : outil créatif et social par excellence ?

Révolution technologique du XXIe siècle, qu'en est-il de l'impression 3D ? Comme de nombreuses technologies, la partie visible d'une innovation entamée ?
19 septembre 2016

C’est au milieu des années 1980 que la technologie fait son apparition, ouvrant son champ d’application grâce à la Fused Deposition Modeling (FDM), dont le principe consiste en un dépôt couche après couche d’un plastique en fusion de type ABS ou PLA.

L’engouement de ces dernières années face à l’impression 3D réside en trois points fondamentaux :

  • les innovations régulières portées à la technologie même,
  • son accessibilité pour le grand public et, en suite logique,
  • l’aspect social que la technologie a ouvert,

grâce à l’échange et au partage de savoir-faire, de modèles à imprimer, de solutions d’impression et d’imagination débridée.

Ce champ des possibles renouvelé, de nombreux concepteurs s’en saisissent aujourd’hui pour alimenter l’univers d’une science-fiction made in XXIe siècle qui, comme l’histoire l’a déjà démontré, deviendra inéluctablement réalité.

Phase d'impression - Photo et réalisation : Eliot Marin-Cudraz
Phase d’impression – Photo et réalisation : Eliot Marin-Cudraz

1 – Impression 3D, l’avènement du Do It Yourself

« Certains viennent pour refaire des pièces détachées d’équipements comme des machines à coudre, des charnières de porte de frigo,… d’autres expérimentent des formes générées par des algorithmes ou dessinées par leurs soins. Et finalement, certains viennent pour faire des pièces pour construire leur propre imprimante ».

Laurent Berthelot, Fablab Manager, Plateforme C, Ping, Nantes

La technologie suit naturellement la mouvance actuelle du DIY, qui invite au recyclage, à la réutilisation et à la réparation plutôt qu’à la consommation directe. A notre époque actuelle d’hyper-connectivité et d’émergence perpétuelle de technologies innovantes, l’impression 3D semble vouloir devenir la boîte à outils idéale en réponse aux maux matériels du quotidien. Si son utilisation peut paraître délicate pour les non-initiés, le retour sur expérience de ceux qui ont osé sauter le pas semble indiquer le contraire :

« On peut se lancer assez facilement dans l’impression 3D, cependant il est nécessaire de distinguer les imprimantes plug-&-play des imprimantes en kit à monter soi-même. En dehors de ça, il est nécessaire d’avoir des connaissances en modélisation 3D, autrement vous pouvez vous rediriger vers des sites comme Thingiverse, qui sont des plateformes d’échanges de fichiers prêts à imprimer, et on y trouve toute sorte d’objets, de la figurine héroïc-fantasy aux drones à fabriquer chez soi ».

Eliot Marin-Cudraz, architecte diplômé d’état

L’avantage, vous l’aurez compris, est celui de l’autonomie. Si les premières étapes à franchir pour maîtriser l’outil semblent parfois paraître insurmontables, l’effort reste cependant valable car il ouvre vers une liberté d’impression aux limites sans cesse repoussées. Car si les premières imprimantes 3D offraient la possibilité d’imprimer à base de matières plastiques, de nouveaux modèles émergent chaque jour, permettant l’impression de filaments de carbone, de fibres de bois ou encore de métal, comme nous le démontre le projet MX3D, une passerelle de métal entièrement imprimée en 3D qui devrait voir le jour d’ici à 2017.

2 – Un outil social

« Je pense qu’elle est un élément d’une révolution. Elle révèle plus largement la mise à disposition de produits électroniques, mécaniques et outils logiciels à un grand nombre de personnes capables de s’organiser en communauté. »

Laurent Berthelot; Fablab Manager; Plateforme C, Ping, Nantes

Parallèle paradoxal à l’autonomie retrouvée dans l’utilisation des imprimantes 3D, l’engouement communautaire qu’elle représente. L’autonomie, synonyme littéral et premier degré de l’outil, a vite été dépassée par le partage, signe que son utilisation a su remporter une victoire majeure sur ce qui aurait pu devenir son principal travers. De nombreuses communautés se sont établies, physiques et virtuelles, comme l’initiative Fablabo à Nantes, ou encore des sites de partage de modèles 3D opérationnels, à l’image du précédemment cité Thingiverse.

Plateforme_C
Ateliers Plateforme C – Nantes

Ces communautés sont aujourd’hui motrices d’innovations régulières car le cumul des compétences qu’elles représentent donne une puissance de feu magistrale à l’outil, qui risque de devenir un objet du quotidien sous quelques années. De ces systèmes de partage émerge une fantastique base de données de connaissances, de savoir-faire, d’imagination et, bien entendu, une bibliothèque florissante d’objets 3D, qui n’attendent que vous pour être imprimés.

En effet, notre époque actuelle, où l’outil manquant nous entraîne irrémédiablement entre les exubérantes gondoles des enseignes de bricolage, risque bientôt de céder le pas à ces bibliothèques virtuelles, où notre irritation manifeste face à l’obligatoire aller-retour au magasin sera remplacée par le soulagement, voire l’enthousiasme, d’une simple session de recherche ou de modélisation de la pièce nécessaire. Un véritable jeu d’enfants, croix de bois, croix de fer !

3 – Le support d’une science-fiction renouvelée

En 1927, Fritz Lang réalise Metropolis, où les communications sont imaginées sous la forme de visio-conférence.

Deux décennies plus tard, Philippe K. Dick dévoile Minority Report, une nouvelle où, entre autres technologies d’anticipation, les voitures se conduisent seules.

En 2016, la visio-conférence est connue de tous, et de grandes entreprises, à l’image de Tesla ou Google, arrivent au terme des phases expérimentales des véhicules autonomes, preuve que la science-fiction rejoint presque toujours la réalité, ou l’inverse, à vous de me dire.

Rapportée à l’impression 3D, la science-fiction anime aujourd’hui de nombreux concepteurs, à l’image de l’entreprise d’impression 3D française Fabulous, qui, en réponse à l’appel à projets de la NASA, dévoilait l’an dernier son concept d’habitat Martien entièrement imprimé en 3D. D’après l’architecte Eliot Marin-Cudraz, la solution proposée par le studio français est pertinente :

« Si l’on prend l’exemple de la construction sur Mars, le principal défi est d’être capable d’utiliser les matériaux sur place afin de construire une base. Chaque kilo envoyé sur Mars coûte environ 10 000 dollars, il est donc intéressant d’y envoyer uniquement des machines ».

Eliot Marin-Cudraz, architecte

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Sfero – Illustration : Fabulous

De la même manière, l’équipe Londonienne de Softkill Design imagine la Protohouse, un habitat entièrement imprimé en 3D à partir d’algorithmes développés d’après la pousse d’un os, permettant à l’imprimante de déposer de la matière en réponse aux besoins structurels de l’habitation imaginée en porte-à-faux. Renversant.

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Protohouse – Illustration : Softkill Design

Dans l’indéniable course au progrès entamée par l’Homme, l’impression 3D semble réussir à s’inscrire dans une démarche inhabituelle de projet participatif d’échelle mondiale. Accessibilité, partage et imagination semblent faire partie des maîtres mots de l’impression 3D.

Si l’architecture a d’ores et déjà pris le pli, le monde de l’éclairage est en reste, et mise à part une poignée d’optiques imprimés en 3 dimensions, la technologie n’est pas – encore – venue révolutionner l’univers de la conception lumière, mais pour combien de temps ?

Et à tous ceux qui ne s’estiment pas assez geeks pour s’y plonger, révisez votre copie car il ne s’agit pas d’un monde de fieffés boutonneux rivés sur leurs machines, mais bien d’individus qui se nourrissent chaque jour de la satisfaction d’avoir répondu, manuellement et numériquement, à l’intemporelle vérité :

« Le progrès n’est que l’accomplissement des utopies ».

Oscar Wilde

Approfondir le sujet

Lieu

  • Plateforme C
  • Nantes, France

Équipe du projet

Association Laurent Berthelot
Logiciel Thingiverse
Architecte Eliot Marin-Cudraz Softkill Design

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Docteur en urbanisme et aménagement de l’espace de l'ENSA Nantes, Nicolas Houel propose une expertise de planification urbaine nocturne inédite alliant créativité, technicité et esprit d’initiative. Sa démarche, axée sur la sobriété lumineuse, lui permet d’aborder les notions riches et complexes liées aux ambiances nocturnes : sécurité, mobilité, identité, environnement ou encore énergie. Son parcours, accompli de manière transversale entre les milieux académiques et professionnels fait de Nicolas Houel un partenaire à privilégier pour les projets les plus exigeants.
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