Les villes d’Europe face à la crise énergétique

Face à une crise énergétique sans précédent, les villes ont multiplié les initiatives pour faire face aux pénuries d’énergie l’hiver dernier, tout en accélérant leur transition écologique. LUCI a lancé une enquête rapide pour comprendre comment certaines villes de son réseau relèvent ce défi pointu.

Pour économiser de l’énergie, les villes d’Europe tamisent ou éteignent les lumières, avec une variété de solutions tenant compte de la temporalité, du territoire et de l’intensité.

Budapest, Hongrie

À Budapest, la ville a adopté une résolution visant à réduire de deux heures la période quotidienne d’éclairage décoratif. Elle se traduit par une réduction de la consommation d’électricité d’environ 800 000 kWh par an, selon Zoltán Pap, directeur général de Budapest Flood and Public Lighting Company.

La municipalité a également accéléré la conversion de ses luminaires aux LED et prévoit une économie d’énergie de 40%. Le volume de la décoration de Noël est considérablement diminué et les autres sont éteintes à 22h au lieu de minuit.

Leipzig, Allemagne

À Leipzig, l’administration municipale a éteint 238 systèmes d’éclairage public depuis juillet 2022. Pour limiter l’électricité à des fins essentielles, les bâtiments, les monuments, les ponts ne sont plus éclairés,  mais aussi, l’éclairage des rivières et des arbres sont éteints.

L’éclairage public fonctionne également en mode basse énergie, ce qui permet de réaliser 11 % d’économies d’énergie, explique Heike Besier, chef adjointe de la section « Public Space Design » à Leipzig.

Vilnius, Lituanie

À Vilnius, les heures d’éclairage ont été réduites, ainsi que le niveau d’éclairage dans les cours d’école et les stades, les parcs à chiens, les tunnels et les autoroutes.

L’éclairage architectural et décoratif sur les façades des bâtiments et les monuments pourrait être éteins à l’avenir.

Paris, France

À Paris, l’illumination de la Tour Eiffel et d’autres monuments sont éteints après 22h depuis septembre 2022. Le conseil municipal a décidé d’éteindre l’éclairage décoratif quelques heures plus tôt que d’habitude.

Les panneaux publicitaires et les publicités lumineuses ont également été temporairement interdits pendant une grande partie de la nuit.

Göteborg, Suède

À Göteborg, la ville a planifié la manière de faire face à une éventuelle pénurie d’énergie dans le cadre d’une stratégie globale de résilience urbaine.

La première mesure consisterait à réduire par tous les moyens possibles l’éclairage à un niveau de 30%. La seconde consisterait à éteindre les luminaires non gradables phase par phase. Le dernier niveau consisterait à éteindre complètement l’éclairage sélectionné.

Lyon, France

À Lyon, la ville a adopté un plan de sobriété visant à réduire la consommation d’énergie de 10% en un an. Depuis novembre 2022, l’éclairage des monuments emblématiques de la ville (370 sites illuminés au total) n’est allumé que le samedi jusqu’à 23h.

Les illuminations de Noël se sont terminées à 23h au lieu de minuit et la période d’illumination a été réduite de deux semaines.

Cependant, la fameuse « Fête des Lumières » s’est déroulée comme d’habitude. La Ville de Lyon explique que la consommation d’énergie lors de cet événement est marginale.

Enfin, la ville a expérimenté l’extinction de l’éclairage public entre 2h et 4h30 du matin quatre soirs par semaine du lundi au jeudi pendant une période de deux mois. Les résultats sont en cours d’analyse.

• A lire aussi : Comment gagner sur la consommation en éclairage public ?

Un compromis délicat entre économies d’énergie, pollution lumineuse et sécurité

La crise énergétique en Europe a donné une nouvelle dimension au débat sur la nécessité de lutter contre la pollution lumineuse tout en garantissant la qualité de vie de tous la nuit.

En effet, la principale motivation de l’augmentation de l’ombre ou de l’extinction des lampadaires est de maîtriser les dépenses publiques. Alors que les prix de l’énergie s’envolent, les municipalités soulignent également que ces mesures auront également des impacts positifs sur les stratégies de réduction des émissions de carbone ainsi que sur la réduction de la pollution lumineuse.

De fortes inquiétudes subsistent autour des questions de sécurité en ville, notamment liées à la mobilité nocturne mais aussi liées au sentiment d’insécurité que peuvent éprouver certains citoyens. C’est le cas notamment des femmes, car la gradation ou de l’extinction de l’éclairage pourraient limiter leurs déplacements après la tombée de la nuit.

D’autres préoccupations ont été exprimées concernant les conséquences sociales de ces mesures sans précédent.

« Nous savons tous que moins de lumière signifie moins de consommation d’énergie, moins de pollution lumineuse, moins d’émissions. Mais la lumière a également une valeur sociale importante qui apporte une contribution majeure à la durabilité sociale de la ville. »

Les mesures qui entraînent plus d’obscurité doivent être accompagnées d’une attention sérieuse pour une expérience renouvelée de l’obscurité en général, car l’obscurité elle-même n’est pas dangereuse ».

Rik van Stiphout, Responsable du programme lumière, Ville d’Eindhoven, Pays-Bas

Enfin, éteindre les lumières est considéré par la plupart comme une solution à court terme ou une expérimentation pour les municipalités. À long terme, la modernisation du réseau d’éclairage, avec la conversion des lampadaires en LED, et la mise en œuvre de solutions d’éclairage intelligent compléteront ces mesures. Elles contribueront à répondre aux objectifs économiques, sociaux et environnementaux des villes, souvent contradictoires.

• Source : article en anglais « Cities tacking the energy crisis ».
• Extrait du magazine : City & Lighting, n°10, association LUCI.
• Traduction en français : Vincent Laganier.

Approfondir le sujet

• Cities & Lighting n°10, éclairage des parcs urbains, sommaire du magazine LUCI
• Extinction nocturne en éclairage public : à tort ou à raison ?
• Sobriété énergétique en éclairage

Photo en tête de l’article : Les villes d’Europe face à la crise énergétique © Nauman Abdul Hafeez, Unsplash