Événement

Peindre la nuit, une exposition sur l’art pictural

Du 13 octobre 2018 au 15 avril 2019, le Centre Pompidou-Metz consacre une exposition de grande ampleur au thème de la nuit dans la peinture moderne et contemporaine.

Fidèle à l’esprit des expositions du Centre Pompidou-Metz, l’exposition Peindre la nuit ne se limite pas de manière exclusive à la peinture, pourtant centrale. La musique, la littérature, la vidéo et la photographie font aussi partie des œuvres présentés.

« La nuit se retrouve au cœur de débats actuels, qu’ils soient :

  1. sociétaux : faut-il ouvrir les magasins la nuit ou la consacrer au sommeil ?
  2. écologiques : comment limiter la pollution lumineuse qui nous empêche de voir les étoiles ou qui dérègle la vie animale ?
  3. politiques : nuit debout, traversées clandestines de frontières,
  4. scientifiques : on repousse sans cesse notre connaissance de la nuit.

Ce monde de la nuit, avec tous ses questionnements, est omniprésent chez les artistes, notamment depuis la fin du XIXe siècle. La nuit a évolué et nous a transformés, à travers des révolutions majeures comme l’électrification et l’éclairage, la psychanalyse ou la conquête spatiale : autant de bouleversements dans la définition et le rapport que l’on entretient avec la nuit ».

Jean-Marie Gallais, commissaire d’exposition, responsable du pôle Programmation, Centre Pompidou-Metz

Léon Spilliaert, Digue et plage, Chalet Royal et galeries d’Ostende, 1908-1909 – Collection privée, Courtesy Patrick Derom Gallery – Photo © Vincent Everarts de Velp

Artistes présentés

L’exposition rassemble une centaine d’artistes :

  • des figures historiques : Winslow Homer, Francis Bacon, Anna-Eva Bergman, Louise Bourgeois, Brassaï, Helen Frankenthaler, Paul Klee, Lee Krasner, Henri Michaux, Joan Mitchell, Amédée Ozenfant….
  • des artistes contemporains : Etel Adnan, Charbel-Joseph H. Boutros, Ann Craven, Peter Doig, Jennifer Douzenel, Rodney Graham, Martin Kippenberger, Paul Kneale, Olaf Nicolai, Gerhard Richter…
  • des  installations spectaculaires dont certaines sont conçues spécialement pour ce projet : Harold Ancart, Raphaël Dallaporta, Spencer Finch, Daisuke Yokota, Navid Nuur…
Fiete Stolte Smoke, (after Still Life with Candle #3), 2016 – Tubes néon, 160 x 75 x 10 cm – Courtesy of Klosterfelde Edition Berlin and the artist – Photo © Studio Fiete Stolte

Parcours de l’exposition

L’exposition est répartie sur deux niveaux et en six parties dont voici un bref aperçu.

Se perdre dans la nuit

Cette première partie est consacrée à cette nuit que nous connaissons : la nuit que nous pouvons observer chaque jour, sous les étoiles ou sous les lueurs des réverbères, la nuit qui révèle quelque chose de notre intérieur, de nos obsessions, et qui nous plonge dans les rêves.

« Au clair de la lune, près de la mer, dans les endroits isolés des campagnes, l’on voit, plongé dans d’amères réflexions, toutes les choses revêtir des formes jaunes, indécises, fantastiques. L’ombre des arbres, tantôt vite, tantôt lentement, court, vient, revient, par diverses formes, en s’aplatissant, en se collant contre la terre ».

Comte de Lautréamont, Les chants de Maldoror, 1890

Georg Scholz, Nächtliche Strassenszene, 1923 © Staatliche Kunsthalle Karlsruhe

Habiter la nuit

Au début du XIXe siècle, l’éclairage public au gaz fait son apparition en Europe, ainsi que les premiers réverbères et en 1879, l’électricité révolutionne l’atmosphère nocturne, tant urbaine que domestique. Les artistes se sont emparés de cette nouvelle lueur artificielle, l’ont exaltée (« il faut détruire le clair de lune ! » lance le futuriste Marinetti). Au bout de quelques décennies, la perception de la nuit urbaine change. Cet éclairage nocturne a fini par révéler ce que le jour cache : les vices de l’Homme.

« La lueur des réverbères, tranchant les ombres, ne les détruit pas, elle les rend plus saillantes : c’est le clair-obscur des grands peintres ».

Restif de la Bretonne, Les Nuits de Paris, 1788-89

Roy Lichtenstein, Moonscape, 1965 – Screenprint on plastic, 50x61cm – Collection particulière © Estate of Roy Lichtenstein New York ADAGP, Paris 2018 – Photo © Tate, London 2018

Obsessions nocturnes

La ville, passée une certaine heure, renvoie l’artiste face à sa solitude dans l’atelier. Insomniaques maladifs ou en quête d’inspiration, les peintres de la nuit sont traversés par des obsessions : quête d’un langage intérieur, dialogue avec des ombres qui s’animent, écriture automatique, exercices de mémoire, résistance, tentation de l’alcool, parfois carburant de la nuit éveillée.

« Mais rien ne traduisait ce présent sans issue et sans repos comme l’ancienne phrase qui revient intégralement sur elle-même, étant construite comme un labyrinthe dont on ne peut sortir, de sorte qu’elle accorde si parfaitement la forme et le contenu de la perdition : in girum imus nocte et consumimur igni. Nous tournons en rond dans la nuit et nous sommes dévorés par le feu ».

Guy Debord, in girum imus nocte et consumimur igni, 1978

Robert Delaunay, Paysage Nocturne (le fiacre), 1906-1907 – Huile sur toile, 43 x 58 cm – Collection particulière © Courtesy Galerie Louis Carre et Cie

Les yeux infinis

La nuit, porte ouverte sur un monde intérieur qui met en sommeil la raison, qui est prêt aux apparitions et aux métamorphoses, est le lieu de la révolution surréaliste. Le projet de « piéger le soleil » hante ces artistes qui se délectent de la nuit, non comme un lieu de divertissement mais comme le royaume de l’inconscient, de l’errance et du rêve. La nuit devient une matière, le noctambulisme un acte créateur et libérateur.

« Tout ce qui nous inspire n’a-t-il pas les couleurs de la Nuit ? »

Novalis, Hymnes à la Nuit, 1800

Paul Klee, Croissance, Pflanzenwachstum), 1921 -Paris, Centre Pompidou, Musée national d’art moderne © Service documentation photographique MNAM – Centre Pompidou, MNAM-CCI Dist. RM © Droits réservés

Les mangeurs d’étoiles

La deuxième partie « De l’intime au cosmos » est dédiée à un rapport plus cosmique et abstrait à la nuit, qui passe par l’observation des étoiles, l’interrogation sur la réalité de cette nuit, sur sa reproductibilité, et qui amène une réflexion quant à notre place dans l’univers.

« La vue des étoiles me fait toujours rêver aussi simplement que me donnent à rêver les points noirs représentant sur la carte géographique villes et villages. Pourquoi, me dis je, les points lumineux du firmament seraient-ils moins
accessibles que les points noirs sur la carte de France ?

Si nous prenons le train pour nous rendre à Tarascon ou à Rouen, nous prenons la mort pour aller dans une étoile ».

Vincent Van Gogh, Lettre à Théo, 9 ou 10 juillet 1888

Vassily Kandinsky, Un Cercle (A), (Ein Kreis (A)), janvier 1928 – Huile sur toile, 35 x 25 cm © Centre Pompidou, MNAM-CCI, DIst. RMN-GP, Philippe Migeat

La nuit m’enveloppe

Le ciel étoilé résiste à la reproduction. Il échappe à l’immobilité. Il change de définition à mesure que l’espace est exploré. Dès lors, comment capter l’essence de cette nuit qui échappe ? En faisant disparaître l’image, au profit de la matière, de l’informe, de la sensation, de l’espace, du vide, l’artiste approche la substance de la nuit.

« Comme tu me plairais, ô Nuit, sans ces étoiles

Dont la lumière parle un langage connu !

Car je cherche le vide, et le noir, et le nu ! »

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, 1840-1857

Augusto Giacometti, Ciel étoilé (Voie lactée), Sternenhimmel (Milchstrasse), 1917 – Huile sur toile, 86 cm © Bündner Kunstmuseum Chur, Schenkung aus Privatbesitz

Riche programmation associée

Tout au long des six mois d’ouverture, l’exposition Peindre la nuit s’accompagne de plusieurs programmes associés conçus comme les prolongements de l’expérience de la visite et organisés selon une logique de « temps forts ».

Catalogue d’exposition

Informations pratiques

Approfondir le sujet

Équipe du projet

Commissaire d'exposition Jean-Marie Gallais Centre Pompidou-Metz

Lieu

  • Centre Pompidou-Metz
  • Metz, France

Livres

Peindre la nuit, catalogue d'exposition

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Sujets Ciel nocturne Art contemporain Metz Centre Pompidou France Rétrospective
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Professions Peintre Artiste contemporain
Fonction du lieu Musée
Thèmes Événement Exposition Art lumière Sculpture Peinture
Rédacteur en chef et éditeur du portail Light ZOOM Lumière depuis 2012. Architecte diplômé de l’École nationale supérieure d’architecture de Nantes. Éclairagiste par passion depuis 1997 en Europe. Auteur de sept ouvrages de référence sur la lumière, l'éclairage, la ville et le bâtiment. Enseignant en éclairage à l’ENSA Nantes et à l’ENSATT Lyon.
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