Upcycling/surcyclage, pour ne plus tourner en rond en éclairage
« Upcycling/surcyclage : comment la réduction des ressources nourrit l’innovation ? » Avec un intitulé pareil, l’ACE (Association des concepteurs lumière et éclairagistes) intègre que la question du réemploi n’est ni une fatalité ni une régression. Elle fait partie des nouveaux outils des acteurs de la lumière de demain.
Upcycling/surcyclage en éclairage
Bien représentés lors de ce rencards, agitateurs d’idées, artistes, concepteurs, fabricants et recycleurs s’accordent enfin sur la nécessité de changer et la manière d’y parvenir. C’est ainsi qu’avec leurs expériences et leurs sensibilités, chacune et chacun se sont succédé afin d’apporter leur pierre à la machine du réemploi. La synthèse établie ci-dessous cherche à déceler les différents leviers d’action par thématique.
Théoriser le surcyclage en conception lumière
Pour définir convenablement un domaine ou une nouvelle manière de l’approcher, rien de tel que les mots. Que veulent-ils dire ? Comment les employer ? À quoi servent-ils ? Pour cet exercice, un trio qualifié incarné par Nawel Creach-Dehouche, Virginie Nicolas et Jean-Marie Croué. Si les premières tentent de donner des définitions aux termes « surcyclage », « retrofit », « recyclage » et « réemploi », le dernier, lui, insiste sur la précision.
En effet, face à une prolifération de dénominations frôlant parfois le greenwashing, il est nécessaire, selon Jean-Marie Croué, de cadrer les choses. Ce n’est qu’avec un accord commun sur des notions claires que la réglementation et les débats sociétaux pourront réellement se concrétiser.
Éprouver le réemploi des luminaires
On parvient peu à imaginer la créativité quand celle-ci dépend uniquement de l’existant. Comment conceptualiser à partir d’un concret fini ? Plusieurs conceptrices et concepteurs n’ont peut-être pas encore la réponse, mais se lancent.
Si tout le monde s’accorde sur la nécessité de changer, la remise en question est moins aisée. La touchante expérience de Mourka (Y a qu’à) en témoigne.
Pour l’agence Concepto, même combat. Sara Castagné et Maëlle Tertrais nous montrent, non sans humour, que faire digérer l’aspect du réemploi à une maîtrise d’ouvrage n’est pas toujours évident. Le jeu politique peut prendre le pas sur l’ambition de dessiner l’éclairage du futur.
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Alexis Coussement (ACL), dont le jargon technique frôle la poésie, clôt le débat avec ses méthodes et ses suivis rigoureux. Trois conditions qui semblent essentielles à la réussite d’un projet qui conjugue le réemploi.
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Continuer le recyclage de la lumière
Si le réemploi se rapproche parfois, hélas, de motivations d’ordre plus économiques qu’éthiques, il est des acteurs qui ne se posent pas la question. Pour eux, réparer ou « faire avec » est une norme, une habitude, une philosophie. Pour cette catégorie, nous pouvons confronter le regard de Raphaël Armand, concepteur lumière, fabricant, designer et de Philippe Morvan, artiste.
Pour eux, utiliser l’existant revêt une valeur patrimoniale, mais également un pouvoir évocateur. Remettre des formes du passé au goût du jour , c’est faire appel à une ressource inépuisable qu’est l’imagination de celui ou celle qui observe ou (re)découvre.
Changer une filière du réemploi
Parmi les maillons essentiels qui forment la chaîne du réemploi, on trouve les fabricants. Plus ou moins vieux, plus ou moins gros, plus ou moins différents, ils s’inscrivent dans une logique industrielle. Les idées de rendement et de productivité sont alors les fondements essentiels d’un système établi depuis des siècles.
Difficile d’envisager un changement de paradigme rapide, si tant est que cela soit possible. Cependant, grâce à la table ronde « Construire une filière », l’espoir est encore là. Parmi les intervenants : Benoît Saes (Technilum), Alexia Delahaye (Eclatec) et Simon Millet (Ambiance lumière).
Commencer avec des déchets de fabrication
Si industrialisation peine parfois à rimer avec réutilisation, on trouve des entrepreneurs qui s’attaquent au défi. Novateurs, et avec des idées différentes dans un monde dont les règles semblent complexes à bousculer, ils s’organisent. Flexibilité et rigueur sont alors les maîtres mots dans ces démarches.
Le designer Armand Bernoud et la stratégie du Studio Maximum, avec une approche quasi industrielle, tentent de faire accepter les variations du déchet recyclé.
Noé Basch avec Mobius, quant à lui, stocke conseils et produits déposés aujourd’hui pour qu’ils retrouvent une place demain.
Bertrand Gilbert de Kraken Lighting se confronte, lui, à la fabrication en bois neuf dont le sourcing et la réparabilité seront le fer de lance d’une production responsable.
Enfin, citons Charles Vicarini qui se lance dans l’aventure de Ralum.
Se mobiliser ensemble pour le réemploi
Quelles que soient les motivations et les manières de réussir le réemploi, il est évident qu’il faut trouver des synergies. C’est ensemble et à toutes les échelles que le projet se fait. Une dimension illustrée par les dernières interventions.
Avec Isabelle Corten et ses projets CLSF (Concepteurs lumière sans frontières), mais aussi Patricia Lavocat et Rue Rangoli, la dimension sociale du réemploi prend tout son sens. Le déjà-là, c’est aussi tous ces citoyens qui aspirent chaque jour à un monde plus équilibré.
L’assistance, venue en nombre lors des Rencards 2023, suscite l’émotion. Rassemblés pour une approche exhaustive du sujet, femmes et hommes de la lumière en France partagent une même envie. Ce sont toutes ces humanités imaginant demain avec passion qui ont laissé notre journaliste et animatrice Frédérique de Gravelaine sans voix !
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Photo en tête de l’article : Raphaël Armand, Frédérique de Gravelaine, Mourka, Simon Millet et Alexia Delahaye, Rencards de l’ACEtylène 2023, Metz – extrait captation vidéo – Réalisateur © Marc Linnhoff
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