Réalisation

Sankai Juku et le mouvement circulaire en lumière

Critique lumière du spectacle de butō contemporain "Meguri" de Sankai Juku. Le mouvement circulaire des corps dans l'espace à la Maison de la Danse de Lyon.

Un plateau nu ou presque pour le dernier spectacle « Meguri » de Sankai Juku, présenté à la Maison de la Danse de Lyon. La scénographie sobre est constituée d’une scène entièrement recouvert de poudre de riz. Il est encadré par deux passerelles en L de quelques centimètres de haut. Un mur de fond affirme le décor végétal, comme s’il nous était parvenu du fond des mers…

Le nom du spectacle « Meguri » vient du mot « Meguru ». En japonais, il « fait référence à la rotation, à un cycle comme celui de l’eau, et, au-delà, à toute chose en mouvement circulaire ».

Sankai Juku maître du butō contemporain

Ushio Amagatsu dans Meguri, Japon – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

D’après le chorégraphe et scénographe Ushio Amagatsu, directeur de la compagnie, « il s’inspire d’animaux aquatiques en forme de plantes, les fossiles de crinoïdes de l’époque du paléozoïque ».

Exubérance marine

Dès le deuxième tableau, la pureté de la composition scénique de Sankai Juku opère. Elle laisse apparaître un animal marin géant au centre du plateau. Ses tentacules s’animent de manière aléatoire. L’impression est accentuée par la lumière en contre-jour bleu turquoise et un éclairage blanc ambré en douche.

Meguri, Japon – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

En fait, il s’agit des bras et des jambes fardés de poudre de riz de quatre danseurs assis sur le dos. Ils sont placés en forme de croix sur la diagonale. La bouche ouverte, comme pour attraper l’air, ils se lèvent et entament des mouvements circulaires de torsion en spirale. Naissance-renaissance ?

Meguri, Japon – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

Tranquillité terrestre

Dans le tableau suivant, trois danseurs de butō sont placés chacun sur une des passerelles de la scène. Cadrées par des découpes blancs chaud, des latéraux à 1,50 mètres du sol rattrapent les ombres sur les visages. L’espace central est éclairé en contre-jour assez fort bleu avec des découpes, tel les mers du Sud.

Meguri, Japon – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

La musique change et les mouvements des danseurs donnent à penser qu’ils sont autour d’un plan d’eau. Pénétrant dans la zone bleue, telle une nouvelle naissance-renaissance, ils montent et descendent en hauteur. Quand ils s’accroupissent, ils ne demeurent éclairés qu’en contre-jour. Instant de magie bleue du chorégraphe à savourer.

Meguri, Japon – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

Vibration électrique

Un autre moment clef du spectacle se produit sur une musique de guitare électrique combinée à de grandes envolées d’orgues. En cœur, quatre danseurs se mettent à vibrer nerveusement. Lorsqu’ils se rapprochent à l’avant-scène, la lumière passe des latéraux à une diagonale face. Blanche, froide et puissante depuis la première passerelle, elle aplatit les ombres comme si les hommes n’avaient plus d’existence et d’épaisseur.

Meguri, Japon – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

La coupe en verre suspendue côté cour se colore de rouge, comme l’espace entre les deux passerelles au sol en fond de scène. En parfaite résonance : la musique, le mouvement de vibration des corps et l’éclairage rasant du fond de scène. Harmonie scénique suprême.

Lumière profondeur

Le fond de scène en résine moulée participe à créer une scénographie avec plus ou moins de profondeur. Il est éclairé en bain de pied par une série de lampes halogène placées à espacement régulier, équipées d’une simple lentille Fresnel. Un petit cache masque, plus ou moins, la vue de la source depuis la salle.

Sankai Juku, Meguri – Maison de la Danse, Lyon, France – Photo : Vincent Laganier

L’envers du décor n’en est pas moins intéressant. D’abord un voile blanc diffuse la lumière sur le fond du décor.

Sankai Juku, Meguri – Maison de la Danse, Lyon, France – Photo : Vincent Laganier

Derrière, une batterie de projecteurs horiziodes filtrés en blanc froid sont installés à plusieurs hauteurs sur des perches.

Sankai Juku, Meguri – Maison de la Danse, Lyon, France – Photo : Vincent Laganier

Selon les tableaux, l’éclairage combine, dans un savant mélange, lumière rasante et lumière en contre-jour, comme un effet de soleil levant ou couchant sur l’horizon.

Meguri, Japon – Danseurs en mouvement circulaire – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

Diagonales rasantes

En bref, les effets lumière les moins réussis du spectacle sont des diagonales rasantes sur le mur du fond.

Meguri, Japon – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

Les projecteurs étant placés trop près du mur, leurs faisceaux ne parviennent pas très loin sur la texture de la paroi. Parmi la pureté des images produites sur scène, ils semblent bien artificiels et anecdotiques.

Sankai Juku, Meguri, Japon – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

« Meguri signifie donc par extension qui circule en suivant un certain ordre ; par exemple, le passage du temps, les changements de saison, et l’évolution des choses… » précise le programme du spectacle de la Maison de la Danse.

Meguri, Japon – Création : mars 2015 – Photo : Sankai Juku

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Lieu

  • Maison de la danse
  • Lyon, France

Équipe artistique

Musique Takashi Kako YAS-KAZ Yoichiro Yoshikawa
Direction artistique Ushio Amagatsu
Chorégraphe Ushio Amagatsu Sankai Juku
Danseurs Ushio Amagatsu Semimaru Toru Iwashita Sho Takeuchi Akihito Ichihara Dai Matsuoka Norihito Ishii Shunsuke Momoki
Costumes Masayo Lizuka
Régisseur plateau Kazuhiko Nakahara
Technicien lumière Satoru Suzuk Satoko Koizumi
Réalisation du mur de fond Roshi
Coproduction Théâtre de la Ville de Paris Kitakyushu Performing Arts Center - Fukuoka Esplanade / Theatres on the Bay - Singapour Sankai Juku - Tokyo

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Fondateur de l'agence de relations publiques LZL Services depuis 2023. Son thème : la lumière et l’éclairage. Rédacteur en chef et éditeur du portail français n°1 Light ZOOM Lumière depuis 2012. Architecte diplômé de l’École nationale supérieure d’architecture de Nantes. Éclairagiste urbain de 1997 à 2013 en Europe. Auteur de huit ouvrages de référence sur la ville, le bâtiment et le millénaire. Enseignant sur l'histoire de la conception lumière à l’ENSA Nantes et à l'éclairage dans l'art contemporain à l’ENSATT Lyon.
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