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Courant continu en éclairage, ça (re)commence quand ?

Et si les luminaires LED étaient alimentés en courant continu ? Une idée qui fait son chemin. Résumé de trois exposés des Lighting Days.

Les Lighting Days qui ont eu lieu à Lyon du 13 au 15 février 2019 sont « le rendez-vous de l’éclairage et de la technologie LED ». Les exposants y ont présenté leurs dernières nouveautés mais il a aussi été question de la fameuse « guerre des courants », pourtant vieille de plus de 120 ans.

A la fin du XIXème siècle, cette controverse fut personnifiée par l’opposition entre Thomas Edison, partisan du courant continu et Nikola Tesla, promoteur de l’alternatif. Ce dernier l’emporta : il est en effet beaucoup moins coûteux de produire et de modifier le courant alternatif que le courant continu. Sauf pour quelques applications spécifiques, l’électricité est effectivement transportée et distribuée sous forme alternative. S’agit-il des prémisses d’une nouvelle guerre ? Le titre d’une conférence aux Lighting Days annonce la couleur : « Courant continu : un nouveau combat » (notez l’absence de point d’interrogation).

Retour du courant continu avec les LED

Le constat est là : les LED doivent être alimentées en continu et la puissance consommée par un luminaire LED baisse et est à présent sensiblement plus faible que pour un luminaire avec des sources de lumière traditionnelles. Élément clé d’un système d’éclairage LED, le driver a pour principale fonction de convertir l’alternatif 230V, 50 Hz (AC pour Alternative Current) en continu à très basse tension (DC pour Direct Current).

Logo du groupe de hard rock australien AC/DC
Logo du groupe de hard rock australien AC/DC

Ludovic Voltz de la société Tridonic énumère les avantages d’avoir un réseau en continu. Les deux tiers d’un driver LED ayant pour rôle de faire la conversion alternatif/continu, il serait pratiquement possible s’en passer.

Carte électronique d’un driver LED en courant alternatif et courant continu
Carte électronique d’un driver LED en courant alternatif et courant continu © Tridonic

L’absence de driver LED représente un gain en efficacité lumineuse mais aussi en fiabilité. Cela permet aussi de dessiner des luminaires plus compacts et plus designs. Par ailleurs, les problèmes d’harmoniques ou de facteur de puissance trop faible qui perturbent le réseau électrique et/ou augmentent les pertes en ligne, sont plus faciles à gérer en amont d’une installation que sur les faibles puissances de chaque luminaire.

Quelle tension en courant continu ?

Il n’existe pas encore de valeur standardisée pour la tension d’une alimentation en courant continu.

Protection contre les contacts directs pour le domaine de la très basse tension (TBT)
Protection contre les contacts directs pour le domaine de la très basse tension (TBT)

Pour l’éclairage intérieur, 60V est une valeur maximale intéressante. Dans la méthode de réalisation en très basse tension de sécurité (TBTS), il s’agit de la tension en continu en dessous de laquelle il n’y a pas de risque de choc électrique si le dispositif est correctement isolé. Plus précisément, il n’est pas nécessaire de prévoir un dispositif de protection contre les contacts directs. Il faut noter que cette limite n’est que de 25V en courant alternatif ce qui constitue un autre avantage pour le continu ! Un consensus pourrait être trouvé en choisissant 48V, la même tension que celle utilisée pour l’alimentation électrique par câble Ethernet (Power over Ethernet ou PoE en anglais). Quant au pilotage de l’éclairage, pas besoin de fils supplémentaires, il peut être fait par courant porteur en ligne.

Autre point à ne pas oublier : il n’y a pas que les LED qui doivent être alimentées en courant continu. Le nombre de chargeurs pour ordinateur ou téléphone portable dans nos habitations en témoigne.

En éclairage public : c’est possible ?

Maxime Van Der Ham, directeur général d’Architecture Réseaux Sarese avance des arguments identiques en faveur du continu mais pour un usage plus prospectif, celui de la rénovation de l’éclairage public. L’idée serait de profiter d’une baisse conséquente de la puissance installée suite à un remplacement par des luminaires LED. Ces nouveaux luminaires pourraient être directement alimentés en courant continu après avoir installé un convertisseur alternatif/continu dans chaque armoire de commande. Si la même intensité de courant électrique peut être obtenue avec une tension continue de 120V, il serait possible de conserver les câbles de distribution existants tout en atteignant le domaine de la très basse tension.

Ce n’est pas aussi simple que pour l’éclairage intérieur car les intensités en jeu sont plus importantes et les dispositifs de sécurité pour le continu sont à ce jour pratiquement inexistants sur le marché. De cet exercice prospectif ressort toutefois que la faisabilité technique est à présent au rendez-vous, et que la suppression de la plupart des auxiliaires électriques pour chaque luminaire constituerait une avancée très prometteuse.

Lampadaires autonomes et courant continu

Parfois, la question du courant alternatif ne se pose même plus. C’est le cas pour Novéa Energies, fabricant de lampadaires autonomes. Julien Rapin, le directeur commercial explique : les LED sont alimentées en continu, le panneau photovoltaïque fournit du continu, et la batterie stocke aussi du continu. Le passage par du courant alternatif n’aurait absolument pas de sens d’autant que les distances en jeu pour le transport d’électricité sont très faibles pour ce type d’application.

Luminaires autonomes avec des panneaux solaires en courant continu
Luminaires autonomes proposés par Novéa Energies en courant continu © Novéa Energies
Simplicité de l’architecture électrique tout en courant continu pour un luminaire autonome
Simplicité de l’architecture électrique tout en courant continu pour un luminaire autonome

En parallèle des Lighting Days, le salon BePositive présentait les bâtiments à énergie positive. Tous ont des panneaux photovoltaïques et tous prévoient l’utilisation de luminaires LED pour l’éclairage. L’innovation est partout… sauf pour la distribution du courant. Résultat : au lieu d’utiliser localement l’électricité produite en courant continu, on le réinjecte sur le réseau apportant une complexité supplémentaire dans la gestion de la production de l’électricité. Et le bilan énergétique globale n’est clairement pas optimisé.

 

Courant continu ou courant alternatif ?

Alors AC ou DC ? Courant continu ou courant alternatif ? Cette conférence ayant eu lieu le jour de la Saint-Valentin, la solution serait sans doute de proposer une coexistence harmonieuse pour la distribution de ces deux types de courants : pas la peine de se (re)faire la guerre !

Approfondir le sujet

Équipe du projet

Salon professionnel Lighting days
Organisateur GL events
Inventeur Thomas Edison Nikola Tesla
Bureau d'études techniques Sarese Maxime Van Der Ham
Matériel d'éclairage Tridonic Ludovic Voltz Novéa Energies Julien Rapin Solaris Lighting

Évènement

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Enseignant-chercheur, Lionel Simonot enseigne l’éclairagisme depuis 2003 à l’École nationale supérieure d’ingénieurs de Poitiers – ENSI Poitiers : cours magistraux et pratiques en photométrie, technologie des sources de lumière, dimensionnement électrique et interactions lumière matière. Ses activités de recherche portent sur les propriétés optiques et l’apparence des matériaux, notamment via le GDR APPAMAT. Applications : films minces nanocomposites, couches de peinture en glacis ou vernis et objets obtenus par impression 3D. Il est auteur de la transposition du livre de Pierre Bougueur, Essai d’optique sur la gradation de la lumière, du livre rétrospectif et prospectif, Éclairage et lumière du IIIe millénaire, 2000-2050, aux éditions Light ZOOM Lumière en 2021.
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