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Efficacité lumineuse : quelles perspectives pour les LED ?

Comment augmenter l’efficacité lumineuse des solutions LED ? Opportunités du mixage coloré de deux à cinq sources. Qualités des innovations technologiques.

Il ne faut pas confondre le rendement énergétique et l’efficacité lumineuse d’une lampe.

  • Le rendement énergétique est le ratio entre la puissance rayonnée (en watts) et la puissance électrique (également en watts) fournie à la lampe. Le rendement n’a pas d’unité.
  • L’efficacité lumineuse affichée en lm/W par les fabricants de lampes correspond au produit du rendement énergétique et de l’efficacité lumineuse du rayonnement.

Rendement énergétique et performance

Quelle source lumineuse présente le meilleur rendement énergétique ? C’est la lampe à incandescence, pourtant la plus énergivore. En effet, pratiquement toute la puissance électrique consommée est rayonnée… mais en grande partie dans l’infrarouge.

Pour les tubes fluorescents ou pour les solutions LED émettant dans le blanc, c’est le contraire. La lumière n’est émise que dans le visible (excellente efficacité lumineuse du rayonnement) mais le rendement est médiocre. La lumière est produite par deux principes d’émission :

  • électroluminescence : dans du mercure sous forme gazeuse pour les tubes fluorescents, dans un semi-conducteur solide pour les LED,
  • photoluminescence : conversion de l’UV vers le visible pour les tubes fluorescents, du bleu vers le jaune pour les LED blanches.

Les deux rendements se multiplient. C’est surtout le rendement d’électroluminescence des solutions LED qui a connu une croissance spectaculaire ces dernières années. Comme une LED blanche est d’abord une LED bleue, on comprend aussi qu’une LED émettant du blanc froid, donc nécessitant une moindre transformation par photoluminescence dans le jaune, présente une plus grande efficacité lumineuse que les LED émettant du blanc chaud.

Lampes à verre diffusant et spots à solutions LED
Lampes à verre diffusant et spots à solutions LED en vente pour le grand public © Vincent Laganier

Mixage coloré et efficacité lumineuse

Potentiellement, le gain en efficacité lumineuse serait significatif sans l’étape de fluorescence, par exemple en émettant du blanc par mélange d’émission de LED rouges, vertes et bleues. Cependant, si les luminaires LED RGB sont fréquemment utilisés pour l’éclairage dynamique, ils ne conviennent actuellement pas pour l’éclairage général en lumière blanche. En effet, les LED de différentes couleurs ne réagissent pas de la même manière à des gradients de température, et ne vieillissent pas non plus de façon identique, modifiant ainsi la couleur blanche déterminée au départ. Si ce problème est un jour surmonté, les calculs ont déjà été effectués pour déterminer la sélection des LED colorées permettant d’optimiser l’efficacité lumineuse du rayonnement pour un IRC donné [Zukauskas et al., 2002] : il serait ainsi possible d’atteindre une efficacité lumineuse de 360 lm/W (hypothèse utopique d’un rendement de 100 %) pour un IRC > 80. Notons que l’obtention d’un rendu des couleurs de grande qualité (IRC > 90) nécessite l’utilisation d’au moins quatre LED colorées pour une efficacité lumineuse à peine plus faible.

Meilleur compromis entre IRC et efficacité lumineuse
Meilleur compromis entre IRC et efficacité lumineuse obtenu par association de 2, 3, 4 ou 5 LED colorées © Zukauskas et al., 2002.

Une autre solution consiste à associer une LED rouge à une LED blanche. Cela permet d’atteindre un optimum d’efficacité lumineuse de 390 lm/W pour un IRC de 90, même pour un blanc chaud (2700 K) [Dai et al., 2016].

Meilleure efficacité lumineuse du rayonnement lumineux
Meilleure efficacité lumineuse du rayonnement obtenu avec une LED blanche et une LED rouge en fonction de la température de couleur pour un IRC de 90 © Dai et al., 2016.

Opportunités des LED et efficacité

Les solutions LED possèdent d’autres qualités qui peuvent être exploitées afin de rendre les systèmes d’éclairage plus efficaces.

  • Les durées de vie des LED sont particulièrement longues – et difficilement quantifiables. Dans certains cas, les fabricants ont sollicité davantage les LED, dégradant ainsi volontairement les durées de vie afin qu’elles deviennent comparables à celles des lampes à décharge, mais permettant aussi d’obtenir une meilleure efficacité.
  • Les luminaires LED présentent souvent des rendements sensiblement supérieurs aux luminaires à tubes fluorescents. En effet, ces derniers émettent dans toutes les directions et une partie du flux émis est perdue dans des dispositifs comme les réflecteurs qui servent à rabattre la lumière, et qui sont inutiles pour les luminaires LED.
  • La gradation est beaucoup plus simple avec les LED qu’avec les lampes à décharge. Il n’est alors pas nécessaire de sur-dimensionner le système d’éclairage à l’installation. Des gains considérables sont également possibles en programmant l’éclairement souhaité selon différents scénarios : pilotage par horloge, détecteur de présence ou capteur de lumière du jour.

 

La course pour l’amélioration de l’efficacité des composants et plus globalement des systèmes d’éclairage utilisant des solutions LED va se poursuivre. Le département de l’énergie aux Etats-Unis projette des efficacités lumineuses de 200 lm/W pour des luminaires LED en 2020. Mais les gains seront ensuite plus faibles. Pour un futur plus lointain, il est difficile de prédire les chemins que pendront les innovations technologiques mais aussi leur acceptation par le marché. Parmi les promesses envisagées, nous pouvons citer :

  • les OLED: LED organiques permettant de créer des sources de lumière surfaciques, éventuellement souples. Longtemps annoncées, elles sont à ce jour encore peu commercialisées pour l’éclairage général.
  • le LiFi: protocole de communication basé sur l’utilisation de la lumière visible. Il offre une seconde fonction aux luminaires LED. A présent expérimentée, cette technologie pourrait se généraliser… ou au contraire se limiter à des applications de niche.

En éclairage comme dans tout autre domaine d’innovation, les voies du marché sont impénétrables !

A suivre…

Efficacité lumineuse et rendu des couleur, il faut choisir

Approfondir le sujet

Photo en tête de l’article : I.C.O.N. et Motoko ishii Lighting Design – Stand Maison et Objet 2017 © Vincent Laganier

Suite de l'article

Introduction Efficacité lumineuse ou rendu des couleurs, il faut choisir
Page 1 Efficacité lumineuse : et si la lampe d’Edison revenait ?
Page 2 Efficacité lumineuse : quelles perspectives pour les LED ?

Lieu

  • ENSI Poitiers
  • Poitiers, France

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Enseignant-chercheur, Lionel Simonot enseigne l’éclairagisme depuis 2003 à l’École nationale supérieure d’ingénieurs de Poitiers – ENSI Poitiers : cours magistraux et pratiques en photométrie, technologie des sources de lumière, dimensionnement électrique et interactions lumière matière. Ses activités de recherche portent sur les propriétés optiques et l’apparence des matériaux, notamment via le GDR APPAMAT. Applications : films minces nanocomposites, couches de peinture en glacis ou vernis et objets obtenus par impression 3D. Il est auteur de la transposition du livre de Pierre Bougueur, Essai d’optique sur la gradation de la lumière, du livre rétrospectif et prospectif, Éclairage et lumière du IIIe millénaire, 2000-2050, aux éditions Light ZOOM Lumière en 2021.
  • Bonjour Lionel et merci pour cet intéressant article. Je pense cependant qu’il nous faudra, à l’avenir, revoir certaines de nos conceptions en matière d’ Additivité. Si les lois que nous utilisons en éclairagisme appliqué s’avèrent exactes sur le plan ENERGETIQUE, en revanche l’additivité s’avère FAUSSE sur le plan des valences chromatiques.ON n’ADDITIONNE PAS des LED MONOCHROMES pour obtenir un SPECTRE RESULTANT !!! Le système visuel ne suit pas les mêmes règles et il est très facile de démontrer l’apparition de phénomènes très peu connus que sont par exemple les « ombres colorées », pratiquement imperceptibles par l’oeil mais bel et bien « ressenties » par le cerveau. En ce qui concerne l’INCANDESCENCE que nous avons abusivement condamnée, nous avons commis une formidable ERREUR. Il y a bien longtemps que l’on sait créer des lampes à incandescence ayant une meilleure efficacité lumineuse que les LED !!! De plus, je prétends que cette lumière des « ORIGINES » a beaucoup plus d’avantages que nous le pensons. Mais les lobbies industriels actuels laisseront-ils la place à la recherche ou bien empêcheront-ils la sortie de nouvelles sources ??
    Cordiales salutations – William

  • Bonjour,
    Je vous cite: « L’efficacité lumineuse affichée en lm/W par les fabricants de lampes correspond au produit du rendement énergétique et de l’efficacité lumineuse du rayonnement. »
    Autrement dit, l’efficacité lumineuse est le produit du rendement énergétique par elle même… C’est récursif ?! 😉
    Je crois que l’on peut parler de rendement énergétique pour la valeur donnée par les industriels étant donné que les lumen sont une mesure du flux d’énergie ‘porté’ par les photons dans les 1str… Autrement dit ce sont bien des ‘watt/watt’… Sans unité.
    Jérôme.

    • Bonjour,
      Je fais effectivement la distinction entre l’efficacité lumineuse du rayonnement (flux rayonné perçu en lm sur flux rayonné en W) et l’efficacité lumineuse de la lampe (flux rayonné perçu en lm sur puissance électrique consommée en W). C’est cette dernière qui est donnée par les fabricants de lampes.
      Entre les deux, il y a le rendement énergétique (flux rayonné en W sur puissance électrique consommée en W).
      A titre d’illustration, une lampe à incandescence présente un excellent rendement énergétique de près de 90% (tout est rayonné !) mais une efficacité lumineuse de rayonnement très faible de moins de 20 lm/W (une très grosse partie du rayonnement est dans l’IR).
      Pour les tubes fluorescents et les LED blanches, c’est l’inverse : tout est émis dans le visible donc l’efficacité lumineuse de rayonnement est très élevée pouvant dépasser les 350 lm/W (ça dépend de l’IRC et de la température de couleur), en revanche, le rendement énergétique est médiocre en raison des pertes de conversion électron/photon de 25% pour les tubes fluos jusqu’à 40% pour les dernières générations de LED blanches.
      En espérant avoir apporté des éclaircissements,
      Lionel Simonot

      • Bonjour,
        Avez-vous une publication a l’appui pour étayer le chiffre de 40 % de rendement pour les led dernières génération ?

        • Bonjour,
          Il y a de grandes différences si l’on considère des LED conçues en laboratoire et des LED commercialisées, et entre une LED individuelle et un luminaire LED.
          Si l’on se place dans ce dernier cas, les fabricants affichent aujourd’hui des efficacités lumineuses pour un luminaire LED de l’ordre de 130 lm/W (par watt électrique).
          Or, l’efficacité lumineuse du rayonnement d’une LED (calculable à partir du spectre d’émission) est de l’ordre de 350 lm/W (par watt rayonné).
          On peut en déduire un rendement (flux rayonné en W / puissance électrique en W) proche de 40%.
          Mais en éclairage, seule l’efficacité lumineuse du luminaire est donnée par les fabricants.

  • Bonjour, j’ai une petite question sur les différents termes :

    Rendement lumineux / Rendement énergétique / Efficacité lumineuse / Efficacité énergétique

    Les définitions peuvent changer suivant les livres ou les articles qu’on peut trouver sur le net.

    Cordialement,
    Guillaume

    • Bonjour,
      Vous avez raison. A ma connaissance, il n’y a pas de terminologie standardisée et il peut y avoir quelques confusions entre articles.
      Je réserverais toutefois le terme de « rendement » pour des rapports entre grandeurs de même dimension (des watts sur des watts ou des lumen sur des lumen) et le terme « d’efficacité lumineuse » pour des lumen sur des watts.
      Le qualificatif lumineux/énergétique ne me parait pas très explicite. Il vaut mieux préciser rendement du luminaire, efficacité lumineuse du rayonnement ou de la lampe, etc.

      Bien cordialement,
      Lionel Simonot

      • Merci.

        Je suis prof de Physique-Chimie. Mais cette partie de la physique, c’est ma bête noire ….
        J’essaye de « vulgariser », simplifier au maximum pour que mes élèves puissent comprendre.

        Vous voyez votre définition du rendement, dans mon manuel scolaire c’est l’efficacité énergétique.
        Mais je fais plus confiance à un chercheur qu’à un livre.

        Cordialement,
        Guillaume

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