Réalisation

Tableau d’une exécution, quand la peinture entre en scène

Tableau d'une exécution de Howard Barker, mise en scène par Claudia Stavisky aux Célestins de Lyon, questionne la représentation scénique de la peinture.
6 janvier 2017

Tableau d’une exécution. Ou comment représenter la création d’une peinture gigantesque sur la scène du théâtre ? C’est l’une des questions auxquelles ont dû faire face le metteur en scène Claudia Stavisky et la scénographe Graciela Galán dans une certaine abstraction.

Scénographie d’art et d’accessoires

Pas de pendrillon, une toile d’art contemporain au lointain et quelques frises pour couper la vision des sources des contre-jours nombreux sur le spectacle. La cage de scène est dépouillée au maximum. Un buste cassé et un podium sur roulettes occupent le plateau, comme de nombreux accessoires au fil de la pièce.

Le plancher se retourne de manière cylindrique au lointain pour permettre plusieurs scènes en apesanteur : la peinture de la toile suspendue, le cimetière et la découverte de la peinture par les commanditaires.

L’action se déroule en Italie dans un atelier d’artiste à Venise. Le texte de Howard Barker est rythmé au couteau. Très charnel, il aborde l’énigme de représentation. Une femme peintre nommée Galactia reçoit la commande d’un tableau monumental, la bataille de Lépante.

Christiane Cohendy en Galactia rayonnante – Tableau d’une exécution, Théâtre des Célestins, Lyon, France – Créateur lumière : Franck Thévenon – Photo : Simon Gosselin

Mais au lieu de glorifier le combat, elle va peintre la vérité de la guerre et des corps morts. Heurtant le politique comme le religieux, un duel s’engage alors avec son commanditaire. Super spectacle avec une Christiane Cohendy en Galactia rayonnante, une scénographie tout en nuances et une lumière en résonance avec le texte.

Selon les scènes, la toile du peinte occupe le sol au centre du plateau ou est suspendue dans le vide de l’espace théâtral depuis les cintres, comme une exposition. Grâce à la magie de l’art théâtral, jamais le public ne verra la toile entière commandée.

Tableau d’une exécution, Théâtre des Célestins, Lyon, France – Scénographe : Graciela Galàn – Créateur lumière : Franck Thévenon – Photo : Simon Gosselin

Par différents artifices, elle sera magistralement suggérée par un immense voile de soie rouge sang. Les personnages de la pièce la traverseront pour mieux signifier la violence de la bataille de Lépante, sujet de la représentation picturale.

Eclairage de concert au théâtre

Dans une ambiance enfumée, les premières scènes se déroulent pendant l’orage. Un plein feu envahit l’ensemble du plateau avec des contre-jours légèrement bleutés et des faces au troisième balcon en blanc neutre.

Premières scènes du spectacle – Tableau d’une exécution, Théâtre des Célestins, Lyon, France – Scénographe : Graciela Galàn – Créateur lumière : Franck Thévenon – Photo : Simon Gosselin

La lumière de Franck Thévenon est vivifiante pour les scènes diurnes et ternes pour les nocturnes. Un contre-jour diagonal derrière le podium conduit souvent à une lumière clef avec sa composante à la face selon le même axe, comme sur une scène de concert !

Scène du cimetière – Tableau d’une exécution, Théâtre des Célestins, Lyon, France – Scénographe : Graciela Galàn – Créateur lumière : Franck Thévenon – Photo : Simon Gosselin

Au fur et à mesure que la tragédie s’engage, la lumière se fait plus dramatique. Tel un éclairage muséal, elle accentue par exemple :

  • la posture du modèle de l’amiral sur un escabeau en avant-scène,
  • le mouvement de la peintre Galactia sur une passerelle suspendue en fond de scène
  • la file de personnages vêtus de noir avec au lointain, pour la scène du cimetière.

Un ou deux latéraux hauts avec des découpes depuis les passerelles dans les cintres créent alors des effets de lumière comme dans un tableau du Caravage.

Point notable du texte de Howard Barker, le mot « lumière » est clamé plusieurs fois  dans des tirades de Galactia :

  • « La lumière du jour envahit la pièce » lors de la découverte de la toile.
  • « Quelqu’un pourrait-il m’apporter de la lumière » dans la prison.
  • « Il n’y a plus de lumière » dans le dialogue entre le peintre et la critique.

Hors des didascalies, voici autant d’indications scéniques prises en compte par l’équipe artistique du spectacle avec brio.

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Lieu

  • Théâtre des Célestins
  • Lyon, France

Équipe artistique

Texte Howard Barker
Texte français Jean-Michel Déprats
Mise en scène Claudia Stavisky
Assistante à la mise en scène Louise Vignaud
Comédiens David Ayala Geoffrey Carey Eric Caruso Christiane Cohendy Anne Comte Valérie Crouzet Simon Delétang Sava Lolov Philippe Magnan Mickaël Pinelli
Voix Didier Sandre
Scénographe Graciela Galán
Peinture Charles Auburtin
Sculpture Olivier Michaud
Créateur lumière Franck Thévenon
Costumes Graciela Galán
Maquillage Cécile Kretschmar
Créateur coiffures Cécile Kretschmar
Environnement sonore Jean-Louis Imbert
Ecrivain Howard Barker
Metteur en scène Claudia Stavisky
Comédien Christiane Cohendy

Équipe technique

Production Célestins, Théâtre de Lyon
Coproduction Comédie de Caen, Centre dramatique national de Normandie La Comédie de Saint-Étienne – Centre dramatique national
Régie Robert Goulier
Régie lumière Daniel Rousset Mustapha Ben Cheikh
Régie son Gilles Daumas Franck Morel
Régie plateau Laurent Patissier
Remerciements Grand Lyon - Métropole de Lyon

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Rédacteur en chef et éditeur du portail Light ZOOM Lumière depuis 2012. Architecte diplômé de l’École nationale supérieure d’architecture de Nantes. Éclairagiste par passion depuis 1997 en Europe. Auteur de sept ouvrages de référence sur la lumière, l'éclairage, la ville et le bâtiment. Enseignant en éclairage à l’ENSA Nantes et à l’ENSATT Lyon.
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